Soixante ans à l’orgue de la cathédrale de Nouméa : Yves Berge, un organiste comblé.
Tout a commencé en 1951, le jour de la fête du Sacré-Cœur : Yves posait pour la première fois ses mains sur le clavier de l’orgue de la cathédrale. Le curé de l’époque était le Père Boileau. Ce fut le début d’une aventure musicale et spirituelle qui allait durer toute une vie.
Depuis 1977, année de la création de l’Association des Amis de l’Orgue, Yves en devint le titulaire fidèle.
Cet instrument, commandé en 1907 chez Cavaillé-Coll, avait été débarqué du voilier "Alice" de la Société Le Nickel en 1909, puis installé pour la fête du Bienheureux Pierre Chanel. Le jour de son inauguration, l’allocution fut prononcée par M. Fourcassie, président du Comité paroissial, qui n’était autre que… l’arrière-grand-père d’Yves. Le premier organiste à le faire résonner fut un prêtre australien, le Père Stevens, avant que de nombreuses organistes féminines ne s’y succèdent.
Depuis 1951, Yves a accompagné d’innombrables célébrations, liturgiques comme officielles. Organiste discret, parfois « caché », il fut pourtant un acteur essentiel de grands moments de l’histoire du Territoire et de l’Église locale : la canonisation de saint Pierre Chanel et le retour de ses reliques, les obsèques de Jean-Marie Tjibaou et de Yéwéné Yéwéné, la Pentecôte 1994 entourée de cardinaux et d’évêques, des ordinations sacerdotales et diaconales, ainsi que tant de mariages, connus ou anonymes. Avec émotion, il aimait se rappeler que son tout premier mariage animé à l’orgue fut celui d’un ami de classe, il y a 60 ans…
Deux restaurations de l’instrument ont marqué son service : une première, partielle, en 1999, privant les fidèles de l’orgue pendant deux mois ; puis une seconde, complète, envoyant l’instrument en Italie pour un retour prévu à Pâques 2012, grâce au soutien des Pouvoirs Publics. Yves accompagna ces étapes avec patience et espérance.
Soixante années de fidélité à l’orgue de la cathédrale : un record qui restera longtemps inégalé.
Aujourd’hui, nous disons à Dieu à Yves. Nous garderons le souvenir de sa passion pour la musique, de sa joie lumineuse, de son amour pour ses filles, ses petits et arrière-petits-enfants, et de son attachement profond à la Nouvelle-Calédonie : sa terre natale de Bourail, son enfance à Poya, son enracinement dans cette histoire, grande et petite, dont il fut un témoin privilégié à travers son art.
Son départ soudain nous a bouleversés. Mais comment rester dans la tristesse, quand nous croyons qu’il a enfin atteint le rivage tant désiré ? Le repas est prêt, et le Maître l’attend sur la plage.
« Entre dans la joie de ton Maître, bon et fidèle serviteur » (Mt 25).
À Dieu, cher Yves, et merci.
Je suis debout au bord de la plage.
Un voilier passe dans la brise du matin et part vers l’océan.
Il est la beauté, il est la vie.
Un voilier passe dans la brise du matin et part vers l’océan.
Il est la beauté, il est la vie.
Je le regarde jusqu’à ce qu’il disparaisse à l’horizon.
Quelqu’un à mon côté dit : «il est parti !»
Parti ? Vers où ?
Parti de mon regard, c’est tout !
Son mât est toujours aussi haut, sa coque a toujours la force de porter sa charge humaine.
Sa disparition totale de ma vue est en moi, pas en lui.
Et juste au moment où quelqu’un près de moi dit : «Il est parti !»
Sa disparition totale de ma vue est en moi, pas en lui.
Et juste au moment où quelqu’un près de moi dit : «Il est parti !»
il y en a d’autres qui, le voyant poindre à l’horizon et venir vers eux,
s’exclament avec joie : «le voilà !».
William Blake
Source : L'accord musical - Musée de la Ville de Nouméa 2008
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